Portrait d'un pouce

Dans une vitrine poussiéreuse du quartier de la Bourse j'ai vu une lithographie de la fin du dix-neuvième siècle, une de ces planches anatomiques qu'on utilisait en classe, mais où seul le pouce y était représenté. On pouvait sentir la texture de la peau sur le dessin, les variations de teint, la transparence de l'ongle, et la cartographie des rides et des plis de ce pouce démontraient, non seulement un prodigieux sens de l'observation, mais quelque chose comme une forme de foi dans le détail. C'était une sorte d'autoportrait de ce dessinateur anonyme, presque une déclaration de principes: le pouce plutôt que le visage.  Même pas la main: le pouce. Une pluie de minuscules numéros renvoyait probablement à des explications au dos de l'image, mais on pouvait s'en passer. Une fois rentré, j'essayai moi aussi un autoportrait du pouce ou à travers le pouce. Il en est sorti ce pouce monstre, prêt à tout écraser sur son passage, qui ne dit peut-être pas tout.

/// En una vidriera polvorosa del barrio de la Bolsa y de la numismática ví una litografía de fines del siglo XIX: una de esas páginas de anatomía que se usaban en la escuela, pero que representaba sólo un pulgar derecho. Uno podía sentir la textura de la piel, las variaciones de tez, la transparencia de la uña, y la cartografía de las arrugas y pliegues del pulgar demostraban no solamente un sentido de la observación casi prodigioso, y el cuidado en la ejecución del dibujo, pero algo más: una suerte de fé en el detalle. Era el autorretrato de ese dibujante anónimo, casi una declaración de principios: el pulgar antes que el rostro, el pulgar basta, si uno pone todo ahí, todo lo que hay. Ni siquiera la mano: el pulgar. Una lluvia de numeritos  refería probablemente à explicaciones en el verso de la imágen, pero uno no las necesitaba realmente. De vuelta al taller intenté yo también un autorretrato del pulgar o a través del pulgar. Salió este pulgar monstruo, listo para aplastar todo a su paso, que tal vez no dice todo lo que tendría.